Mercredi 19 septembre 2001

On se fait niquer quotidiennement

Certains jours, je n’en reviens pas comme le temps passe. On arrive au soir avec l’impression d’avoir été couillonné quelque part. Escroqué. On a payé pour 24h et ils ne nous en ont fournis que 23. Je pense que c’est ça. On est grugés en permanence, si ça se trouve et on met ça sur le compte de, je ne sais pas, une « la perception subjective du temps ». Je t’en foutrai. La subjectivité est une belle arnaque si ça se trouve aussi. Tout n’est qu’arnaque. A commencer par la paranoïa, pour faire passer le tout. Oui oui oui.

Setiembre

Dites-donc: il pleut. A vache qui pisse, dit-on joliment chez nous. Chez les autres aussi? Bon. Donc, il pleut. Ah la vache!

Fais du feu dans la cheminée… (canson)

Je reviens. Je suis parti vendredi dernier – pour la Fête de l’Huma où j’étais sensé signer des livres à une foule en délire d’une part, et puis accomplir deux ou trois autres choses dites professionnelles d’autre part.

Nous avons, mon épouse and me, pris le train. Et sommes arrivés à Paris dans la soirée, vers 22h 30, dans ces eaux-là. Vigie Pirates battait son plein: pas un flic, pas un militaire, nada total, à la gare de l’est, dis-donc. On s’est dit qu’ils arrêtaient sans doute le boulot à 19h, un truc comme ça.

(En règle générale, d’ailleurs, je n’ai jamais vu aussi peu de flics à Paris que pendant ces trois jours, ni dans le métro ni nulle part. D’habitude ils fourmillent. Je me suis dit qu’ils devaient se cacher, ou être déguisés. Vachement bien. D’ailleurs, le lundi à midi, au restau, il y avait deux très vieilles dames à la table voisine dans les 100 ans chacune, qui ne me semblaient guère catholiques. Enfin bref.)

Monsieur Marc

Ce monsieur-là c’est Marc, un des réceptionnistes et gardiens de nuit de l’hôtel Chomel où on descend souvent et où on monte ensuite dans un ascenseur gros comme une boite d’allumettes.

On parle de choses et d’autres, avec Marc. De son chien, souvent.

Fiesta de humanidad

Fête de l’Huma. Beau temps et beaucoup de monde. La preuve.

Sauf que je n’avais pas le bras assez long pour cadrer une plongée sérieuse. Mais bon.

Du monde, donc, et beaucoup. Ambiance. La Fête de l’Huma est le seul endroit où quand on te bouscule on s’excuse et on te sourit ensuite, dans la camaraderie… je ne plaisante pas. Ambiance dis-je. Un peu plombée et grave, vus les événements. A la Courneuve, ça se situe. Le moindre avion qui passe fait lever les têtes. C’est pas la consternation des veaux ni les discours de chauffeurs de taxis. C’est autre chose. Des êtres humains qui pensent. J’ai fait le tour vite fait avant de trouver le « village » du livre. Quelques amigos, dont Guillaume Cherel qui tremble pour son roman tout neuf comme on tremble pour son enfant qui vient de naître, forcément.

Et puis aussi:

Patrick Raynal revenant d’un cassoulet aux fèves (sic).

Et puis voilà. Tout ça pour signer une quinzaine de bouquins en deux jours. L’endroit n’est pas tout à fait celui qu’on croit, pour le livre. Les gens viennent acheter des saucisses d’Ardèche et écouter Manu Chao, Compay Segundo et Patrick Bruel. C’est pas plus mal, au fond.

Les zacotés

Le premier soir, dîner en compagnie de mon agent (e) cinéma et un producteur sympa et ses amis, où ça? au Karaoké Chinatown Belleville!!! Il aurait fallu me trouver d’urgence, c’était sûrement pas là que quelqu’un qui me connaît bien serait venu me chercher en premier, je sais. Eh bien c’était très bien. C’est étonnant, la karaoké, vraie atmosphère chine. En plus, il y avait un mariage, chinois donc, avec une vraie mariée comme dans les films documentaires. Si j’ai chanté? non, pas trop. Mais c’était parfois très émouvant à regarder et à écouter. Le monde. Sous les avions qui passent. Sous les avions, le monde…

J’aurais pu, chanter, cela dit. Ma voisine, entre autres occupants de la table, l’a fait. Elle avait le trac, on ne l’obligeait pas mais elle voulait le faire, elle a bu un tas de whisky pour se donner du courage, ça a marché.

J’ai passé une délicieuse soirée chez mon ami Dionnet (j’aime bien penser « mon ami Dionnet ») et sa jolie Fatima d’épouse. Jean-Pierre a comme projet immédiat de se reposer, ce qui n’est pas bête du tout. Nous en avons par contre un autre, de projet, lui et moi. Je n’en dirai pas plus pour le moment… Ça fait deux ans au moins, déjà, que c’est en cours. Dionnet, Moebius, Pelot. En principe.

Lundi matin (l’empereur, sa femme et le p’tit prince…)

Je suis allé faire une visite rapide et surprise chez RIVAGES. J’adore ça. J’adore, d’ailleurs, me retrouver aux éditions Rivages. Non seulement depuis Le Pacte des Loups, mais avant aussi. Surtout depuis Le Pacte, evidentemente… (qui marche bien, merci). C’est un endroit plein de gens sympas, surtout plusieurs. Je ne parle pas de François Guérif, un jour je le ferai tout exprès et en plusieurs pages parce que la carrure de l’homme l’exige. Je parle par exemple de Doug Headline qui est mon éditeur du Pacte et grâce à qui j’ai écrit ce roman. Salut Doug. D’ailleurs, Doug, c’est lui, sur la photo, là.

Et à côté de Doug, c’est Marie, la dame des droits étrangers — une épée! non seulement tout à fait charmante mais d’une sacrée efficacité! Quant à l’échelle derrière eux, je ne sais pas ce qu’elle fiche là. D’ailleurs c’est plutôt un escabeau.

J’ai croisé très vite dans le couloir Jean-François, le boss, qui courait allez savoir où en perdant des enveloppes de courrier et qui a été surpris de me voir — cet homme commence à m’intriguer délicieusement…

J’ai salué Benoîte aussi qui n’est pas sur la photo mais ce qui ne l’empêche pas d’être née elle aussi un 13 novembre, comme moi, et d’ailleurs il va falloir commencer à y songer sérieusement. Un jour, chez Rivages, au pot de l’éditeur pour fêter les je ne sais plus combien de milliers d’exemplaires du Pacte, j’ai rencontré Chabrol qui m’est tombé dans les bras. C’était bien. A cette époque, l’attachée de presse s’appelait Christine, elle est partie depuis vers d’autres noirs horizons, ne donne plus signe de vie, merci Christine, et je lui avait promis un tour de Grande Roue si le Pacte dépassait les 20 000 ex. J’ai pas tenu ma promesse jusqu’à présent. Sans doute est-ce la cause du silence de la fugueuse… Il faudrait bien aussi que j’en fasse un, de pot, pour le Pacte, tiens. Soit chez Rivages, soit ici chez moi… ils vont tous vouloir chez Rivages, j’en suis sûr.

Denoël

Après quoi je suis allé faire le même genre de visite surprise chez Denoël. C’est aussi plein de gens sympas, notamment plusieurs, particulièrement. On a parlé de mon travail en cours. J’ai le trac. Bon, je l’ai déjà dit. On a parlé aussi de projets de rééditions possibles, une décision doit être prise. Et éventuellement d’une édition des BOCALS. Mais là, j’y crois à peine. Chez Denoël, je veux dire. Ce que je crois, par contre, c’est que ces Bocals finiront par quitter le cadre de ces pages.

Sinon ça va.

Le seul trajet du retour depuis Nancy jusqu’ici a été plus fatiguant que tout le reste: grève !!! à cause d’un contrôleur battu. Jonglerie entre trains absent et remplaçants et taxis, informations contradictoires, etc.

Rentré chez moi tardivement. Les chats dormaient.

Et Mardi,

hop, au boulot derechef (qui fait partie, derechef, des mots que j’aime bien — j’en ai découvert un autre, hier soir: guerpir dans le « Dictionnaire françoislatin de Robert Estienne (1549) » — je te vais te lui trouver emploi pas plus tard que tout à l’heure, à lui, sans problème.

Comme vache qui pisse est une expression faible. Le troupeau vient de s’y mettre avec enthousiasme, là.

Post scriptum

Connaissez-vous le magazine Côté Est ? El ejemplar de septembre est consacré aux Vosges et c’est pourquoi on m’a demandé d’en écrire l’édito. Eh bien cet ejemplar est tout simplement superbe. Comme les autres, certes, sinon plus. Fichtre!

Post scriptum (bis)

Pourquoi tant d’hispanoladeries, me direz-vous, émaillant ce texte? Et pourquoi pas, vous répondrai-je avec fermeté.

Hasta luego