Jeudi 6 septembre 2001

C’est la rentrée

Il me semble avoir déjà entendu ça. Depuis quelques temps il ne se passe pas une semaine sans que ce soit la rentrée — me dit-on comme si c’était la première de mes préoccupations. La rentrée de ceci et la rentrée de cela. D’une certaine catégorie d’écoliers, d’une autre, de certains zommes politiques, d’autres, littéraire, télévisuelle, radiophonique, des carpes dans les étangs, des couturiers, théâtrale, dans les murs, les arbres, et que sais-je encore. Aujourd’hui, voilà que c’est une nouvelle rentrée des classes, donc, pour quelques-millions-de-jeunes-enfants, et au journal de 13h nous aurons droit à des images sélectionnant quatre de ces quelques millions en train de pleurer au seuil de leur vie de citoyen. Ça va être une belle journée, je sens ça. Pour le moment il est 8h 27, rien de grave dans mes environs, c’est déjà ça de pris.

Rubrique étrangetés

(Si je saucissonne ce bavardage en rubriques c’est pour que ce soit plus lisible et aéré, vous savez tout.)

J’ai reçu ça hier par mail:

Cher(e)s tou(te)s,

Pour un prochain numéro de x*, nous recherchons les personnes intéressées par un questionnaire sur Harry Potter de J.K. Rowling (Gallimard jeunesse). Nous avons déjà contacté les anglo-saxons. Voilà les questions :

Selon vous :

Est-ce que JK Rowling a apporté ou non quelque chose au fantastique jeunesse avec Harry Potter ?

Comment analysez-vous ce phénomène littéraire et la pottermania des jeunes lecteurs (est-ce bon ou non) ?

Pensez-vous que ces lecteurs sont bien plus destinés à devenir des lecteurs de fantastique que les lecteurs de R.L. Stine (Chair de poule) ?

Enviez-vous ce succès ?

Les réponses doivent nous parvenir pour le 15 octobre. Merci de vous mobiliser pour que nous ayons autant de témoignages francophones qu’anglo-saxons.

*Par soucis de je ne sais quoi, d’instinct, je ne cite pas la source, mais cela dit je le pourrais, c’est une revue axée fantastique que dirigent des petits jeunes sympas, qui commencent d’ailleurs à ne plus l’être tant que ça, jeunes, hé hé hé, et voilà que tout ce qu’ils trouvent pour se donner l’air de le rester, jeunes et sympas, c’est ce questionnaire sur lequel je ne ferai AUCUN commentaire.

Le soleil vient de se lever, c’est une belle journée qui s’annonce, bis.

Rubrique intérêt national :

(voir précédente)

Rubrique sans commentaire

(j’ai dit que je n’en faisais AUCUN)

Rubrique « J’adore la question »

J’adore la question : Enviez-vous ce succès?

Rubrique magazines

Connaissez-vous Ténèbres? C’est un magazine que dirigent d’une main de fer enthousiaste des petits jeunes sympas et qui parle (qui écrit, plutôt, le magazine) de fantastique, et qui en fait le tour dans tous les sens, c’est plein d’interviews fondamentalement incontournables, d’articles de fond (NON! pas le ski ! n’allez pas leur écrire pour acheter des lattes ou une paire de pompes, c’est malin…), de trucs et de critiques et de machins, tout, en un mot. J’entends dire de partout que c’est bien. En général, « partout », ce sont des personnes tout à fait fiables, je leur fais donc confiance, quant à moi il y a lurette que je n’achète plus de magazine ni de veau aux hormones et lurette idem qu’on ne m’en adresse plus à je ne sais quel titre — de veau aux hormones non plus, d’ailleurs. Les temps changent.

Voilà que j’entends Sylvain-mon-pote-de-la-carrière-d’en-bas qui vient de mettre en marche son tracto. Ça va être une belle journée, ne manque plus que l’ami qui? Ri-co-ré !!!!

Nostalblues

Quand j’étais petit, mais déjà plus tant, j’avais sainte horreur de cette période de l’année. Pourquoi dit-on « sainte » avant « horreur »? Existe-t-il en contrepoint une damnée horreur? Sans aucun doute. Une sainte horreur donc de cette période de rentrée. Pas tant à cause de ce qui m’attendait que de ce que je laissais derrière… les vacances, le soleil, l’odeur du foin coupé, les jours qui se lèvent sur un rai de soleil traversé de poussière dorée par l’interstice du volet, les jeux avec mes camarades — on jouait aux « Diables de Guadalcanal » dans les arbres, c’étaient nos avions on sautait en parachute quand il étaient touchés par les Japs, un carré de tissu accroché par quatre ficelles aux épaules, des fois ça se mettait en torche, on tombait de 1000 pieds et on s’écrasait comme des merdes dans la rivière, un jour Claude s’est cassé le poignet —, des lectures de Spirou chaque jeudi étalé sur une couverture au bord de la rivière qui était encore une rivière honnête. Etc. Soupirs. Et voilà bing que c’était le temps revenu des brumes matinales fraîches des feuilles fritées qui commencent à tomber une à une, de l’odeur de vase sur la rivière. Trois fois que je parle de la rivière en quelques minutes. La rivière était notre monde, un univers à elle seule. Un jour je tenterai de le raconter. Un jour que je mangerai une bonne, une très bonne madeleine.

On jouait aussi aux Indiens. Aux cow-boys et aux Indiens. C’est de là sans nul doute que date mon intérêt pour le western et au-delà pour la vraie histoire derrière le mythe. La preuve que ça me turlupinait sec cet univers, tout petit déjà…

Certes, c’était pas Harry Potter.

J’avais dit: no coment!

Ha la la…

A cette heure, c’est donc la rentrée, des milliers de gens, voire davantage, se ruent à leur travail dans les métros et les trains et sur les routes. Et même à vélo. Je cherche un peu désespérément l’ami Ricoré dans la foule.

Il y a bel et bien des brumes matinales. Frisquet. Je vais aller m’y mouiller un peu les pieds, couper du bois pour la chaudière.

Hasta luego.